Aime-moi Mamour

EVENEMENTS, JANVIER 1947 A FIN MARS 1948

En dépit de toutes mes turpitudes diverses, le monde n’a pas cessé de tourner, et toujours à Paris :

-« Sous le pont Mirabeau,

Coule la Seine…


Début 1947 verra monsieur Léon Blum – l’homme du Front Populaire de 1936 -, revenir aux affaires ! En janvier, pour tenter de juguler l’inflation, il lancera une expérience originale : Décréter une baisse des prix autoritaire de 5 %... Deux mois plus tard, il était contraint de démissionner…

Le 16 janvier, on connaîtra le premier Président de la IVième République : Vincent Auriol. Son chef de gouvernement sera monsieur Ramadier, à la blanche barbichette. Au ministère des anciens combattants apparaîtra un jeune inconnu : François Mitterrand.

Les Américains nous livrent enfin du blé en février, pour palier à notre pénurie alimentaire : 200.000 tonnes… qui seront en réalité du maïs, en raison du mauvais emploi de « corn », ce qui nous vaudra pendant plusieurs mois de manger, après le pain gris de l’occupation, le pain jauni de la liberté...

Les députés communistes refusent de voter les crédits militaires pour l’Indochine, où les combats font rage.

L’horizon s’assombrit également à Madagascar, où éclatent, le 19 mars, des émeutes indépendantistes.

En Palestine, violentes actions de l’Irgoun juif contre les Anglais, dont la plus spectaculaire sera le dynamitage de la prison de Saint-Jean-d’Acre, qui permettra la libération de 189 prisonniers hébreux...

Le Roi du Maroc, Mohamed ben Youssef, manifeste à son tour, en avril, un souhait d’indépendance pour son pays.

Décidément, tout l’Empire Colonial français qui faisait l’orgueil des hommes de ma génération, et l’objet de mes rêves de jeunesse, se trouve menacé.

Notre armée doit d’ailleurs intervenir, le 11 mai, pour réprimer une rébellion à Madagascar. Au cours de durs combats il y aura plusieurs dizaines de milliers de morts malgaches, mais leur résistance ne sera pas anéantie pour autant : Ils continueront à réclamer l’indépendance. A nouveau, en ces circonstances, les députés communistes refuseront l’envoi de renforts supplémentaires.

En juin va s’instaurer, entretenue par les communistes et leur syndicat, la C.G.T., une vague de grèves qui dureront de longues semaines. La S.N.C.F. sera paralysée.

On parlera beaucoup dans la presse, de la mainmise progressive de l’U.R.S.S. sur l’Europe Centrale : Celle-ci crée un vif sentiment d’inquiétude aux U.S.A., qui en arrivent à redouter que tout le continent européen ne devienne communiste en raison de son extrême pauvreté due à ces cinq ans de guerre. Pour y pallier, ils décideront alors de l’aider économiquement. Ce sera le but du plan Marshall.

Sur le plan politique international, après les candeurs de Roosevelt envers Staline, les U.S.A. semblent maintenant convaincus de la duplicité du maître de toutes les Russie !

Les Juifs, dans leur volonté arrêtée d’obtenir un territoire national au détriment de la Palestine, vont faire parler d’eux de manière spectaculaire en juillet, avec la rocambolesque aventure d’un vieux bateau surchargé d’émigrants : l’Exodus.

Quatre mille cinq cent trente passagers que les Anglais empêcheront de débarquer à Haïfa… Il voguera alors vers Marseille, où les autorités françaises lui refuseront l’escale. Il tentera enfin de rallier Hambourg, où la police allemande contraindra les passagers à


débarquer par la force, après deux mois d’une odyssée lamentable !

A la suite d’âpres discussions avec les syndicats, le gouvernement, pour que cessent les grèves qui paralysent le pays, accepte de relever les salaires de 11 %, en août.

En sport, Robic remporte le Tour de France cycliste.

En France, en dépit du plan Marshall, la ration de pain est réduite à 200 grammes par jour, trois ans après le débarquement, deux ans après la fin de la guerre !

Faut-il à tout prix conserver notre romanesque et si lointaine Indochine, perle de notre Empire colonial ? Il semble que le gouvernement y soit maintenant décidé. De gros effectifs et un énorme matériel seront engagés à partir d’octobre. Une nouvelle guerre s’annonce, à 20.000 kilomètres de Paris.

Spectaculaire succès de De Gaulle aux élections : Le parti R.P.F. qu’il a fondé, triomphe dans toutes les grandes villes : Bordeaux, Rennes, Strasbourg, et même Lille pourtant traditionnellement fief socialiste !

Fort de ce succès sans précédent, il réclame la dissolution de l’Assemblée.

Un avion militaire U.S., le BELL. X.1., franchit pour la première fois le “mur du son” : 1 078 km/h ! Prodigieux !

Coup de tonnerre dans le ciel de la planète en novembre : Molotov annonce que les U.S.A. ne sont plus les seuls à détenir la bombe atomique, symbole de la puissance suprême: Moscou vient d’expérimenter la sienne dans les steppes de Sibérie !

Toujours en novembre, lassés dans leur lutte contre l’immigration juive, les Anglais évacuent la Palestine. L’O.N.U. décidera de la partagera en deux : Une partie arabe, l’autre juive. Jérusalem restant sous contrôle de l’Organisation des Nations Unies.

Ainsi se trouve réalisé en ces lieux le souhait biblique juif d’une “terre promise”, territoire que l’Empereur romain Titus, en l’an 70 de notre ère, avait rayé d’un trait, entraînant la diaspora du peuple hébreu à travers le monde, dix-neuf siècles plus tôt.

Le problème juif se trouve-t-il pour autant réglé ? La réponse à cette question ne va pas tarder...

Le 15 novembre, en France, grande grève, presque insurrectionnelle, dans les Mines. Ramadier démissionne. Les arrêts de travail se généralisent et se durcissent. 80.000 militaires réservistes seront appelés d’urgence devant la gravité de la situation intérieure.

Le nouveau premier ministre, R. Schumann, confie le portefeuille de l’Intérieur à un socialiste, Jules Moch, homme courageux et énergique qui, en dépit de son ancrage politique à gauche, brisera la grève en faisant intervenir les forces armées stationnées en Allemagne. Il s’attirera ainsi la haine des communistes.

Selon tout le faste traditionnel britannique, Elisabeth, future reine d’Angleterre, épousera le 20 novembre le Prince Philippe. Occasion de la première retransmission télévisée en « eurovision ».

Mon train habituel, Paris Lille, déraillera à Arras, le 3 décembre : Plus de cent victimes.

Autre drame, le légendaire Général Leclerc, héros de la 2ème D.B. qui libéra Paris et Strasbourg, trouve la mort dans un banal (?) accident d’avion, en Afrique du Nord.


Ainsi s’achèvera l’année 1947, dans les flonflons de l’orchestre de Ray Ventura, et sur les airs des chansons :
Danse avec moi...
A bicyclette... avec un nouveau venu : Bourvil !
La mer... de monsieur Trenet
La vie en rose... interprétée par Edith Piaf

Au cinéma, deux films feront date : “Le Diable au Corps”, d’après le roman de Radiguet, et “Quai des Orfèvres”, de H. G. Clouzot.

Dans l’industrie du vêtement, deux événements nous concerneront particulièrement : Fin des restrictions textiles, et révolution dans la mode !

Celle-ci s’allonge, s’évase, taille serrée, poitrine décolletée qui impose de nouveaux soutiens gorge, “pigeonnants”. Engouement pour les bustiers très moulants qui dénudent des épaules.

Ces lignes nouvelles m’enthousiasment par leur féminité, et m’incitent à créer des modèles “dans le vent”, qui connaîtront un certain succès.

Janvier 1948. La Haganah, le noyau dur armé d’Israël, est en véritable guerre ouverte contre les Anglais.

Stupeur ! Staline met brutalement la main sur la Bulgarie, qui perd ainsi son identité.

Le 30, le vénérable Mahatma Gandhi est assassiné.

En France, une mesure sociale importante est décrétée : L’Assurance Vieillesse des Travailleurs non Salariés. Celle-ci concerne notamment mon grand-père Henriot, qui risquait de devenir totalement à la charge de ses enfants !

Le 26, nouvelle dévaluation considérable du franc, de 44 % ! Le dollar vaut désormais 214 francs.

Tonnerre en Europe le 28 février ! C’est le “Coup de Prague” : Staline s’empare politiquement et militairement de la Tchécoslovaquie. Les pays occidentaux sont stupéfaits et inquiets : Jusqu’où ira le Tsar Rouge, qui possède maintenant la bombe atomique et ne redoute donc plus l’anéantissement unilatéral américain ?

Peu après, il va tenter de faire “tomber” Berlin occupée aux trois-quarts par les alliés, d’abord en contrôlant, puis limitant, et finalement interrompant totalement les transports des occidentaux vers l’ancienne capitale du Reich.

La tension internationale atteindra alors un point de rupture.

La situation militaire en Indochine empire : En mars, alors que les combats font rage en Cochinchine dans la plaine des Joncs, les Viets attaquent le convoi de Saigon Dalat : 200 morts !

Alors que les journaux passent de quatre à six pages (et coûtent 8 francs), la vie politique en France devient instable, voire dangereuse. De plus, le 21, une nouvelle grève des mineurs, de caractère insurrectionnel, à lieu dans le Nord et Pas-de-Calais.

Devant la gravité de la situation, le Général De Gaulle se déclare prêt à assumer, s’il le fallait, toutes les responsabilités du pouvoir.

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Maurice NONET
Dernière modification le : February 27 2007 17:33:59.
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