Racines

HISTOIRE DU BAN DE CREVIC.

Au Moyen Age

Au moyen Age l'Eglise était très puissante. Les Evêques appartenaient à la Haute Noblesse. Ils étaient choisis par le Roi ou par l'Empereur. Le Pape acceptait ce choix. En principe ils percevaient le montant des 2/3 de la dîme recueillie dans leur Evêché aussi leur revenu était très important. En Lorraine trois évêchés étaient groupés autour de Metz, Toul, Verdun. Les Evêques de ces trois villes étaient souvent des Princes de la Maison de Lorraine. Ils avaient le titre de Prince du Saint Empire.

A cette époque il y avait de nombreux prieurés et Abbaye (Monastères). Dans notre région l'Abbaye Saint Pierre de Remiremont était réservée aux Dames de la Haute Noblesse. Les chanoinesses de Remiremont élisaient leur Abbesse qui avait le titre de Princesse du Saint Empire et devait rendre hommage à l'Empereur. Les chanoinesses amenaient en dot un fief* (Terres). Aussi l'Abbaye de Remiremont appelée Chapitre de Remiremont était très riche et (b, )2 baris* c't /8


Le ban de Crévic

Le ban de l’Abbaye qui comprenait : l’Abbaye Grand Vezain, Sommerviller, Flainval, Hudiviller et la moitié d'Anthelupt appartenait au Chapitre de Remiremont. Les chanoinesses de Remiremont possédaient de nombreuses terres sur le ban de Crévic. Ces terres étaient louées à des fermiers. La dîme perçue sur les bans et paroisses était partagée 2/3 pour le Chapitre, 1/3 pour le curé de la paroisse. La dîme était payée par tous les fermiers, les propriétaires y compris les Nobles. En 1590 les grosses dîmes consistaient en blé, seigle, avoine le 1/10e de la récolte. Les menues dîmes 1/10e sur le vin, les légumes, pois, fèves, orge, millet, laine, porcelets, agneaux et volailles. Le tout était amodié à un habitant : l'amodiateur, moyennant une redevance annuelle. En 1590 pour la paroisse de Lenoncourt le montant de cette redevance était de 500 Frs (soit 30. 000 Frs 1981). L'amodiateur récupérait en argent la valeur de la dîme auprès des habitants à la St Martin et versait 2/3 au Chapitre de Remiremont, 1/3 au curé de la paroisse.

Les premiers écrits

Le premier document qui fasse mention du ban de Crévic est un diplôme de l'Empereur d'Allemagne Henri IV daté de Mantoue le 28 septembre 1070. En 1210 le Duc de Lorraine Ferry II reconnaît par lettre les droits du Chapitre de Remiremont sur le ban de Crévic.

En 1303 le Prieur de Saint Don (Flainval) est condamné à restituer au Chapitre les 2/3 des grosses et menues dîmes de la saison des Viaux situés à l’Abbaye

En 1376 acensement* (location) par le Chapitre du 1/4 du moulin d'Aulne situé sous les vignes de Crévic aux habitants de Crévic moyennant un cens* annuel de 2 florins d'or (1000 Frs 1981).

En 1378 accord entre le Chapitre de Remiremont et les habitants de Crévic. Le Chapitre pour les 2/3, le curé pour 1/3 s’engage à fournir aux habitants les bêtes mâles (taureau - verrats -béliers).

En 1388 le prieur de Léomont acense* aux habitants de Grand Vezain et à un habitant de Crévic le pré appelé "Pré aux moines" situé sous le Petit Vezain pour un cens annuel de 2 florins d'or (1000 Frs 1981).

La charte du ban de Crévic

A la fin du XIVe siècle vers l'an 1400 le Chapitre de Remiremont a accordé une charte au Ban de Crévic. C'était un grand progrès comparé aux autres seigneureries oÙ le Seigneur* agissait selon son bon plaisir. Le Chapitre désigne un ou plusieurs seigneurs pour défendre ses intérêts dans le Ban. Ces seigneurs appelés 'Voués* (défenseur du Ban). D'après la charte du ban de Crévic les redevances étaient fixées car en plus de la dîme des taxes étaient perçues pour moudre le grain - cuire le pain - presser le raisin. Seul les Nobles (Seigneurs) avaient le droit de posséder un moulin, un four, un pressoir. La charte fixait le montant des redevances ce qui évitait des abus. Voici quelques articles de cette charte.

Art. 7. Les Seigneurs doivent cuire 24 pains pour 1, le droit du four banal se paie au 1/24.

Art. 8. La propriété des fours appartient au Seigneur. Le Maire doit les affermer* en leurs noms de même que le droit de pêche dans la rivière. Le Maire est chargé de collecter le montant en argent des redevances pour moudre le blé, cuire le pain, presser les vendanges.

Art. 9. Les prud'hommes du ban (Chef de Famille) peuvent pêcher à la ligne, à la "charpagne" à la "trille" (il s'agit de filets).

Art. 20. Un cheval de trait doit une taxe de 6 toulois (le toulois valait 30 francs 1981 une vache à lait 6 toulois, 3 brebis 1 toulois.

Art. 21. Les laboureurs doivent des corvées de charrue chez le seigneur voué - 1 jour en carême avant la Saint Georges (avril), 1 jour avant la Saint Jean (juin), 1 jour en septembre, 1 jour en octobre.

Art. 22. Les manoeuvres doivent chez le seigneur voué 2 jours de corvées à la fenaison pour la faulx et la fauche, 2 jours à la moisson pour les blés et les avoines, 1 jour à la vendange, 1 jour aux semailles d'automne. Toutes ces corvées sont dues au Seigneur de Dombasle qui est voué du Ban de Crévic. Les fermiers des fermes appartenant aux Dames de Remiremont sont exempts de corvées.

Art. 24. Un bourgeois qui aurait quitté le ban de Crévic peut y revenir et y jouir des mêmes privilèges qu'auparavant. Le Maire ne peut le refuser. Le Maire peut retenir un bourgeois qui veut quitter le Ban du 29 juin au 29 août (période des moissons).

Art. 25. On ne peut saisir un bourgeois du Ban de l’Abbaye que pendant la nuit et le Maire ne peut l'arrêter sans être accompagné de sa justice, c'est-à-dire de son échevin* (chargé de rendre la justice) de son doyen (amodiateur du Ban), de ses bangards (garde champêtre et garde forestier).

Art. 27. Quand on veut nommer un Maire, les prud'hommes doivent le présenter et le Chancelier (officier du Chapitre) doit l'instituer. Le Maire crée les autres officiers (échevin doyen bagnards) d'après l'élection faite par les prud'hommes (Chef de Famille).

Art. 30. Les sergents (gardes champêtres et forestiers) doivent faire leur rapport aux plaids* annaux et prennent le tiers des amendes perçues. Tous les ans il y a un ou plusieurs plaids (assemblée de tous les prud'hommes) dans le ban de Crévic.

Art. 32. Le Maire, le Curé et les sergents sont autorisés à faire pâturer un cheval sur les près du Ban.

Tels sont les principaux articles contenus dans la Charte du Ban de Crévic dont la copie se trouve aux Archives Départementales à Epinal.

Au XVe et XVIe siècles

En 1479 Wary de Lucy, chevalier et Adrien de Savigny, tous deux Seigneurs de Dombasle sont voués. du Ban de Crévic.

En 1528, François Malclerc est anobli par lettres du Duc Antoine de Lorraine datées du 22 septembre 1528. François Malclerc possède un fief à Crévic, il est donc Seigneur de Crévic car le fait de posséder un bien foncier sur le territoire d'une commune donnait aux Nobles le titre de Seigneur dans cette commune.

En 1546 Wary de Lucy, Seigneur de Dombasle, prieur commendataire de Flavigny fonda deux bourses au Collège de la marche à Paris pour y entretenir à l'étude pendant la durée de 8 années, deux enfants pauvres qui doivent être nés à Sommerviller, Grand Vezain, Hudiviller, l’Abbaye Anthelupt sur la présentation du curé de l’Abbaye ou du vicaire de Dombasle (à cette époque la moitié de Sommerviller dépendait de la paroisse de l’Abbaye ; l'autre moitié était de la paroisse de Dombasle.

En 1547 nouvelle fondation pour aider cinq pauvres filles de ces villages et de celui de Flavigny.


LES GUERRES DE RELIGION

A partir de 1562 sous le règne du Roi de France, Charles IX, beau-frère du Duc de Lorraine Charles III, les guerres de Religion dévastent l'Europe. Les protestants français moins nombreux demandent des secours aux Princes protestants d'Allemagne. Ceux-ci leur envoient des corps entiers de cavaliers (les reîtres) et de fantassins (les lansquenets) qui sont obligés de traverser la Lorraine en venant en France et en retournant en Allemagne. Ces troupes pillent et brûlent tout sur leur passage d'autant plus volontiers que les Lorrains sont catholiques. 11 y eut à cette époque six passages de mercenaires en Lorraine en 1562-1567, 1575-1587, 1590-1591. Le village de Crévic ne fut pas épargné. Les archives de la paroisse de Crévic furent totalement détruites par les soldats. A cette époque il n'y avait pas de Registres d'Etat-Civil. Le Curé de la paroisse tenait le registre des baptêmes, des mariages, des décès. Aussi pour Crévic, le premier registre de la paroisse date de 1591 le précédent registre ayant été détruit. Les registres depuis 1591 se trouvent aux Archives Départementales à Nancy.

En 1564 un arrêt de la Cour de Nancy condamne le sieur Tacquenet curé à démolir son pressoir. Les moulins, les fours, les pressoirs appartiennent au Chapitre de Remiremont et aux Seigneurs voués du Ban.

La guerre de trente ans

En 1630, les Suédois viennent au secours des Princes Protestants Allemands en lutte contre la Ligue Catholique (Autriche -Bavière, Hongrie, Lorraine). A cette époque la Lorraine était un pays prospère. Charles de Lespine écrit après un voyage en Lorraine en 1612 "La Lorraine est un très beau pays abondant en toutes sortes de commodités pour la vie humaine : quantité de bon et beau blé, des vignes dont le vin est excellent et de toutes sortes de fruits. Elle a aussi de forts beaux étangs abondant de beaux poissons, des salines qui portent un grand revenu à son Altesse et des mines d'argent, de cuivre, d'étain, de plomb, de fer. Bref, il n'y manque rien et il n'y a pas de pays au monde où l'on soit mieux traité".

Hélas ! la guerre de 30 ans va dévaster la Lorraine et faire de ce beau pays un véritable désert. En 1631, Richelieu s'allie au Suédois. Les troupes françaises et suédoises envahissent et ravagent la Lorraine. Richelieu ordonne la destruction de tous les châteaux forts et recommande à ses troupes de raser et de brûler le maximum de maisons. Villes et villages lorrains sont assiégés, pillés, brûlés.

Les Suédois, sur la fin de 1635 entrent à St Nicolas de Port, entrés dans la cathédrale où le peuple assistait à la grand, messe ils massacrent une grande partie des gens puis ils mirent le feu à l'église après avoir enduit de lard les boiseries. Ensuite, le flambeau à la main, courant par toutes les rues après avoir pillé les maisons, ils y portèrent le feu tuant et massacrant les habitants. Saint Nicolas fut saccagé de la manière la plus barbare qu'on saurait imaginer et cela dura 3 jours consécutifs.

En plus de l'invasion étrangère, la peste et la famine font leur apparition. En 1633 on ramasse 52 morts en une seule nuit à Einville. Rambervillers tombe de 2.660 habitants à 400. A Lunéville, les naissances passent de 211 en 1624 à 29 en 1639, 31 en 1655.


L’ABBAYE DEVASTE

Le « ban de Crévic qui compte six communes tombe de 256 familles à 20 familles. Crévic n'a plus que 10 habitants. Pendant cette période de guerre et de misère, le hameau du Petit Vezain situé à l'extrémité du chemin des Hauts Jardins est complètement détruit. Il en est de même du village de Danez situé entre l’Abbaye et Vitrimont au pied de Leomont.

A Crévic, les pestiférés se réfugient dans le bois de Crévic où ils vivaient comme ils le pouvaient, bien souvent des racines des arbres et évidemment y mouraient, d'où est resté le lieu-dit "Cimetière du bois", où furent enterrés tous les pauvres reclus du coin. Des ossements appartenant à des hommes de grande taille furent découverts "au Tombois" ces squelettes sont probablement les restes de soldats suédois tués dans les combats qui eurent lieu dans la vallée du Sanon.

La population étant réduite à néant, les terres étaient abandonnées, en friches, il n'y avait plus d'héritiers. Ces terres tombées en deshéhence (sans héritier) furent distribuées par le Duc de Lorraine aux seigneurs pour les faire remettre en état par les gens du pays et par les étrangers venus s'installer en Lorraine.

Les terres du ban de Crévic furent données en partie aux chanoinesses (dames Nobles) de Remiremont par le Chapitre de Remiremont qui possédait le ban de Crévic.


Aux XVIIe et XVIIIe siècles

En 1663, Didier Simonin, échevin de Grand Vezain est inhumé dans la chapelle Saint Sébastien à l'intérieur de l'église de Crévic. Grand Vezain ne possédait pas d'église.

En 1681, arrêt de la Chambre Royale de Metz ordonnant au Comte de Counonge, Seigneur de Dombasle, au Marquis de Saint Blin, Seigneur de Blainville et au sieur Malclerc, Seigneur de Crévic, vassaux du Chapitre de Remiremont, de fournir à l'Abbesse, leurs fois et hommages.

En 1711, Monseigneur François Blouet de Camilly, Evêque et Comte de Toul, Prince du Saint Empire et Conseiller du Roi de France, ordonne de faire le recensement des biens appartenait aux paroisses de son évêché. La paroisse de Crévic possède 24 jours de terre et 15 fauchées de près. (Le jour = 20 ares. La fauchée = 20 ares). Les Seigneurs possédant les biens à Crévic sont : le Chapitre de Remiremont, las Marquis de Bassompierre, de Blainville, de Coublans, de Lamberti, les sieurs du Hautois et Malclerc. Pour être seigneur d'un pays il suffisait d'être Noble et posséder quelques biens fonciers dans ce pays.

En 1710, Crévic n'avait que 77 habitants.

En 1724, procès entre le Chapitre et les communautés du Ban de Crévic qui condamne les particuliers à faire démolir les pressoirs construits par eux dans leur maison. Les raisins doivent être pressurés dans les pressoirs banaux des seigneurs. Le seigneur voué prend le sixième seau pour droit de pressurage.

En 1745, dénombrement des terres et vignes appelées "ensenges "*, appartenant au Chapitre. Une déclaration et arpentage des dits biens furent fournis par Anne Gerdole, veuve de François Barabau en son vivant doyen au ban de Crévic, fermier des terres d'ensenges en exécution du bail qui lui avait été passé par la Comtesse des Armoises, dame aumonière du Chapitre. Baux des dites terres situées sur le ban de Crévic : Crévic - Anthelupt, Hudiviller et Sommerviller lesquelles terres ont été laissées au Chapitre par Jeanne de Saint Astier, Catherine de Choiseul, la Comtesse de Stainville, Marie de Crux, Hélène de Cléron, la Comtesse des Armoises, la Comtesse d'Osmond, et la Comtesse de Lentilhac.

En 1725-1726-1727 les plaids annaux (assemblée des Chefs de Famille) sont tenus au logis de l'échevin Denis Simonin sous la présidence de l'officier représentant le Chapitre de Remiremont.

Assistaient ou étaient représentés à ces plaids les différents seigneurs propriétaires sur le ban. La Maréchale de Bassompierre de Dombasle, Monsieur de Mahuet, baron du Saint Empire, seigneur de Drouville et de Courbesseaux. Le comte de Lupcourt, le sieur François Malclerc, François de Fériet, seigneur du Dordal et de Crévic, conseiller du Duc Léopold de Lorraine outre ces noms, nous trouvons ceux de Simonin, Maire du Ban de Crévic et Monin de Crévic, greffier.

En 1751, l'église de Crévic est reconstruite : la nef et le clocher seul reste de l'ancienne église, le choeur datant du Moyen Age. La première pierre a été posée le 29 mai 1751, en présence de Messire Joseph, baron de Fériet, conseiller d'Etat de sa Majesté le Roi de Pologne. Duc de Lorraine et de Bar, de Messire Jean Nicolas de Féries, seigneur du ban de l’Abbaye, capitaine au Régiment de Languedoc infanterie et bénite par Messire François de Féries, licencié en Théologie, aumônier du Roi de Pologne et chanoine de St Mihiel, tous trois frères. Ladite pierre a été posée sous la voûte de la tour (voir inscription à droite en entrant à l'église). L'église a été bénite le 14 novembre 1751 par l'abbé Marulier prêtre et curé de l’Abbaye en présence de Joseph Simonien, prêtre vicaire de Sommeiller, des sieurs Denis Simonien, Maire du Ban de l’Abbaye, Jean Risette, syndic de Grand Vain, Paul Perette, syndic de l’Abbaye, Pierre Humbert, Régent d'Ecole.

En 1769, décès de François Simonien, Maire du Ban de Crévic, marié à marguerite Racquemal (plaque de marbre à l'intérieur de l'église - côté des hommes). François Simonin était le fils de Dominique Simonin, né en 1663, décédé en 1740, inhumé dans l'église de Crévic (inscription côté gauche en entrant dans l'église). Ce sont tous deux les ancêtres des familles Simonin de Crévic.

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Maurice NONET
Dernière modification le : January 31 2007 19:12:18.
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