Racines

Lignée NONET-PICAUT

Mon père et ma mère étant malheureusement déjà décédés, je dispose de peu d'éléments pour les évoquer. Evidemment, je connais les dates et lieux de naissance de mes grands-parents Joseph Nonet, né à Preuilly sur Claise le 26/4/1862, Marie Emilie Picault, née à Châtellerault en 1860, le 10 mars.

Afin d'élargir mes connaissances, j'ai interrogé le Minitel des P.T.T.. A tous les Nonet (ou Nonnet) ainsi recensés, j'ai adressé un courrier, soit cent dix-sept lettres ! Seulement une quinzaine de réponses semblait correspondre à ma région d'origine et à ma chronologie, une dizaine se rapportait à ma souche directe.

Je repris alors des enquêtes systématiques, véritables filatures policières qui me donnèrent l'occasion d'entrer en contact avec les très obligeants membres de cercles généalogistes de trois départements.

Trois départements, car les ancêtres de mon patronyme avaient eu la bonne idée de naître, vivre et mourir dans une région qui sera partagée en trois départements : l'Indre, l'Indre et Loire, et la Vienne. Cela ne simplifiait pas la besogne !

Après douze mois d'enquête, les renseignements commencèrent à devenir plus nombreux et précis. Je pus ainsi constituer le début d'un arbre généalogique.

Il s'agissait d'une chaîne de Nonet à partir d'un ancêtre lointain, Jean, né vers 1615, dont le nom était orthographié Nonnet (ce "n" avait sans doute disparu à la suite de la mode simplificatrice révolutionnaire), laboureurs ou journaliers, tous issus d'une région située en bordure de la rivière "la Claise", affluent de la Creuse, entre les villes du Grand Pressigny, la Roche Posay, et la région des étangs de la Brenne à une trentaine de kilomètres à l'ouest de Châtellerault.

Le berceau le plus ancien était le village de Martizay, sur la route de Le-Blanc à Châtillon sur Indre. Cinq générations y avaient vécu dans les mêmes lieux depuis les années 1615-1620, à compter de ce Jean Nonet qui y épousa une Perrine Mercadier, ma plus ancienne grand-mère paternelle connue.

Puis se succédèrent un Etienne, et trois autres Jean.

Ensuite un François s'installa à Bossay-sur Claise, à six kilomètres à l'ouest de Martizay, au temps du Premier Empire. Mon arrière grand-père Joseph vécut à Boussay, cinq kms plus loin. Mon grand-père paternel naquit à Preuilly-sur Claise le 12 avril 1862.


Un Jean Nonet né vers 1615 ! Je me prends à rêver à ce lointain ancêtre dont le père était né peu après l'assassinat de Henri IV!

Le Duc d'Orléans régnait alors sur cette province de l'Orléanais, l'une des plus étendues et des plus riches du royaume.

La vallée de la Claise était vouée aux céréales, à la vigne et à l'élevage. J'imagine la vie difficile des ouvriers laboureurs de ce temps, leur subordination à la fatalité de leur simple origine.

Cette condition de journaliers agricoles s'exerça sept générations durant sur cette branche de ma famille, jusqu'au père de mon père, qui tentera l'aventure d'un commerce artisanal...


Je n'ai pas pu résister au désir de connaître les lieux où naquirent, se marièrent et moururent tant de mes ancêtres directs dont je porte le sang et suis l'héritier patronymique.

La Claise est encore aujourd'hui une riante rivière au cours paisible, dont la largeur est surprenante. Elle serpente dans une campagne fertile, doucement vallonnée, entre bouquets d'arbres aux essences variées, prairies et champs ombragés par les puissantes ramures de très nombreux noyers. Les rives sont accueillantes, bordées de saules et propices à la pêche. Les coteaux sont plantés de vignes.

L'église de Martizay, simple mais fière, dont l'essentiel date du 12ème siècle, retient mon regard. Là ont été baptisés, mariés, honorés lors de leur mort, cinq générations de ma race !

L'ordonnance de la place, ombragée de tilleuls, n'a pas dû beaucoup changer depuis quatre siècles. Il m'est facile de laisser voguer mon imagination...

Je découvre à Bossay, à une lieue et demie, une superbe église très ancienne, dédiée à Saint-Martin, au robuste clocher carré renforcé par deux tourelles dissymétriques à toit conique. Le portail, en plein cintre, est décoré de chimères. Mon trisaïeul François s'y agenouillait tous les dimanches. Au- dessus des maisons, subsistent les ruines d'un château fortifié.

Boussay ( à ne pas confondre avec Bossay), à une heure de marche, est un paisible village dont la modeste église a connu les heures essentielles de la vie de mon bisaïeul Joseph né en 1830. Un remarquable château du 15ème, la jouxte.

Preuilly-sur-Claise, bourg chef-lieu de canton de la région, présente de nombreux édifices très anciens épargnés par le temps : De très vieilles maisons, un beau château et surtout une magnifique et importante église romane ! Mon grand-père y a été baptisé.

Martizay, Bossay, Boussay, Preuilly... Cette attrayante et pittoresque contrée incite à la douceur de vivre : C'est le berceau de ma famille paternelle!


Parmi les documents officiels que j'ai pu recueillir dans les presbytères et mairies, j'observe la profession des épousées. Elle est notée au hasard des actes de mariage dont j'ai pu avoir copie. Elles étaient lingères, servantes, couturières, "gagistes" (employées à gages).

En effet, que faire d'autre quand on est fille de journalier que de "servir"? Et d'épouser ensuite un autre fils de laboureur ?

Ma grand-mère, Amélie Picault fut une exception. Cela ne lui porta d'ailleurs pas chance : Sa famille, aisée et de petite bourgeoisie, la déshéritera quand elle épousera contre leur gré, mon modeste grand père Joseph commis épicier !


En consultant le peu de documents que j'ai de la vie de mes ancêtres, je suis amené à faire trois constatations.

- D'abord le nombre de leurs enfants : au moins trois ou quatre par génération.

- Puis l'âge généralement tardif des mariages : Autour de trente ans pour les hommes, et plus de vingt cinq pour les femmes. Ces âges avancés s'expliquent par la pauvreté des foyers : Fils et filles doivent d'abord subvenir aux besoins de leurs parents âgés, avant de penser à s'établir.

- Enfin la relativement courte longévité des Nonet, qui m'incitera personnellement, par prudence, à une certaine hâte dans la rédaction de ce document...

Une autre surprise, au niveau professionnel, me sera réservée par le métier du père d'une lointaine grand-mère Gardereau, épousée en secondes noces par un Jean Nonet en 1785 : Marinière !

Cette profession rappelle l'importance des transports par voie d'eau pendant les temps qui précédèrent l'ère industrielle et le développement des machines à vapeur.

En pays de Loire, les bateaux utilisés étaient les « gabarres ». Elles descendaient vers l'ouest au fil du courant, et remontaient avec l'aide d'une voile gonflée par les vents d'ouest.

Un autre « preuve » de l'extrême modestie de la situation de mes ancêtres est attestée par un extrait du contrat de mariage de mon proche arrière-grand-père, Joseph Nonet (encore orthographié Nonnet), lors de son mariage avec Anne Barrault, le 30 avril 1860 :

« Le futur se constitue personnellement en dot :

Un coffre en chêne et tour de lit en indienne            30 frs

Les vêtements, hardes et linge personnel              150 frs

Une somme de mille francs épargnée 1 000 frs

Environ 16,48 ares de terre 300 frs

Total 1480 frs

-« La future se constitue personnellement en dot :

Vêtements, hardes et linge personnels 150 frs

C'était tout. Le marié était donc plus riche que la promise ! (cf. Photocopie de cet acte en annexe)


Enfin, examinant la finalité actuelle de ma souche, je suis fort mélancolique en constatant que la lignée issue de mon grand-père Joseph Nonet et de ma grand-mère Amélie Picault, n'a plus que deux descendants masculins vivant encore au moment où j'entreprends ces pages. L'un issu du frère de mon père, et le deuxième, le fils de mon propre fils !

Pire : Au cours de ma rédaction, j'apprendrai que le premier venait de se tuer en moto... Il ne restait donc aujourd'hui qu'un seul Nonet de ma souche : Philippe, mon petit fils !

Occasionnellement, j'apprendrai aussi que la descendance d'un frère de mon arrière-grand-père n'a pas été plus épargnée. Pourtant elle comptait quatre garçons... Mais trois sont morts sans enfants. Le quatrième a eu trois fils, tous mariés, et malheureusement sans descendance masculine...


Fatalité ?


Du côté de ma grand-mère Picault, je n'ai pas pu remonter au-delà du milieu du 18ème siècle... Là, une autre surprise m'attendait : à partir d'un Jean Picault, né en 1776 à Châtellerault, il semble que ce furent également ensuite, trois générations... de mariniers !

Décidément la batellerie avait marqué mes ascendants... Cela m'incita à demander des éclaircissements aux amis généalogistes de Touraine qui m'avaient déjà si aimablement et utilement documenté.

Grâce à eux, j'aurai la confirmation de l'importance des transports par bateau dans le passé : Des trains de nacelles chargées de matériaux et denrées étaient remorqués par une "Gabarre", dotée d'un mât abattable pour le passage des ponts, équipé d'une grande voile carrée.

Elles descendaient, depuis les forêts des hauts pays du Massif Central (Bourbonnais, Nivernais), le courant de la Vienne, puis celui de la Loire jusqu'à Nantes. Là, cargaisons de bois et embarcations des nacelles étaient vendues... comme bois de chauffage ! Les équipages, enrichis du prix du transport et de cette vente, revenaient à pied vers leur point de départ, et à cette occasion, traversaient notamment la région de Châtellerault, pour reconstruire une nouvelle flottille !

Cette surprenante coutume dont la mémoire est presque totalement oubliée, explique par son côté migratoire et par la provisoire richesse des équipages lors du voyage retour, d'étonnantes occasions de mariages... dont je serai l'un des lointains témoignages vivants !

Tel est, actuellement, le point de mes investigations généalogiques Nonet Picault..


Mon père, lui aussi, avait fait des recherches dont il ne m'avait que peu parlé : Il était convaincu que sa vie serait très longue... Nous aussi... Ce qui explique l'absence de documents écrits de sa main. Je citerai donc, de mémoire, ce qu'il avait bien voulu nous dire.

Profitant sans doute des facilités que lui offrait son séjour au Séminaire de Tours, de l'abondance des documents diocésains auxquels il pouvait avoir accès, et de ses relations ecclésiastiques, il avait remonté les origines de sa famille plusieurs siècles au-delà des miennes !

Je crois me souvenir qu'il avait pu aller même bien au-delà de l'obligation, vers 1300, de la tenue obligatoire par décision papale, des premiers livres de baptême...

Il nous avait raconté avoir découvert que le patronyme Nonet avait pour première origine le surnom du neuvième enfant d'une famille, sans doute gallo-romaine.

En effet, après la conquête de la Gaulle, nombreux furent les soldats romains vainqueurs qui se sédentarisèrent sur des terres données en récompense, et qui épousèrent des femmes gauloises. Ce neuvième enfant, "Nonétius", aurait légué son surnom à sa descendance, et serait devenu Nonet par abréviation.

Un autre exemple typique de transmission de patronyme d'origine romaine dans cette région, est celui de la famille "Cassius", dont une fille épousera le frère de mon père, et un fils, une de ses soeurs. Famille Cassius, originaire de Châtellerault.

D'autre part, il avait pu déterminer le "terroir" le plus ancien de cette souche de Nonetius : La région de Thouars, à 70 kms à l'ouest de Châtellerault.

Sans doute pour fuir l'invasion arabe au début du 8ème siècle, celle-ci s'était déplacée en direction du plateau de Sainte-Maure. Ainsi que le désigne le nom du lieu, ce fut l'endroit où furent parquées ensuite les prisonniers sarrasins - qui étaient des arabes, des « maures » - après leur défaite à Poitiers face aux armées franques de Charles Martel en l'an 732.

Les Nonetius apprirent alors de ceux-ci la profession de fabricants d'armes blanches, qu'ils exercèrent longtemps.

Enfin, en raison d'autres guerres, ils furent contraints à un troisième repli, et s'installèrent définitivement vers le 16ème siècle, dans la région de la vallée de la Claise, comme simples laboureurs.

Tout ceci est de transmission orale et de mémoire, donc sans certitude, et sous toute réserve.

C'est le peu dont je pense me souvenir, de l'histoire des Nonetius-Nonnet, et je suis heureux de l'avoir ainsi consigné, pour mémoire...


Région de La Haye Descartes

Le Martizay d'autrefois

Le Martizay d'autrefois

Le Martizay d'autrefois (voir ci-dessous, un corbillard d'époque

un corbillard d'époque

Martizay d'aujourd'hui : 5 générations de NONET, depuis 1615, y sont nés, s'y sont mariés... Ont prié dans cette église...

...ont rêvé au bord de cette rivière, la Claise!

BOSSAY - François NONET 1797-1871

BOUSSAY - Joseph NONET 1830-1871

PREUILLY-s/CLAISE Joseph NONET 1862-1942

Retour au sommaire <-- --> Chapitre suivant


Maurice NONET
Dernière modification le : February 28 2008 15:47:34.
Valid XHTML 1.0 Transitional